samedi 7 mai 2011

Les Sondage en direct d'un Institut...


« Sondage A : 92 % de Français s'estiment heureux. Sondage B : 2 millions d'analphabètes en France. A mon avis, dans les 92 %, il y en a qui ne connaissent pas leur malheur. » (Guy Bedos, Petites drôleries et autres méchancetés sans importance)
« A la question : faites vous encore confiance aux instituts de sondage ? 64% des Français répondent non. Et 59% répondent oui. » (Philippe Geluck, Le chat à Malibu)
« Les sondages ne votent pas, ce sont les gens qui votent ! » (Hillary Clinton, Campagne électorale 2000)
« On peut se demander si le manque d'appétence des électeurs pour les urnes ne résulte pas de la publication des sondages annonçant que les carottes sont cuites plusieurs semaines avant qu'on passe à table. » (Philippe Bouvard, Mille et une pensées, 2005)
Pour comprendre les sondages, le mieux est d'interroger directement une société spécialisée. Le document ci-dessous est extrait du site de l'ipsos (consultable in extenso à l'adresse suivante : http://www.ipsos.fr/faq).
1. Comment choisit-on les personnes interrogées ?
En théorie, les personnes interrogées pour un sondage devraient être choisies au hasard. C’est ce qu’on appelle la méthode aléatoire : on tire au sort un certain nombre de personnes qui constitueront l’échantillon à interroger.
En France, cette méthode n’est pratiquement pas appliquée. Les instituts de sondage utilisent une autre technique, celle des ' quotas '. Il s’agit alors d’interroger un échantillon de personnes qui ont les mêmes caractéristiques socio-démographiques que l’ensemble de la population. Les critères utilisés pour ce faire sont généralement le sexe, l’âge, la catégorie socio-professionnelle, le type de commune, la région.
2. Quels sont les avantages et inconvénients de la méthode des quotas ?
Par rapport à la méthode aléatoire, celle des quotas a l’avantage d’être plus rapide. Avec l’aléatoire, les sondés ne sont pas ' interchangeables '. Cela signifie que la personne tirée au sort doit être recontactée autant de fois que nécessaire. Grâce aux quotas, il est possible de remplacer un sondé par un autre qui a les mêmes caractéristiques socio-démographiques. Cela permet de réaliser un sondage dans des délais plus courts.
L’inconvénient majeur de la méthode des quotas est de ne pas permettre de calculer scientifiquement la marge d’erreur du sondage. Les lois statistiques qui permettent de la déterminer ne valent théoriquement que pour les sondages aléatoires. En pratique, on considère cependant que la marge d’erreur des sondages par quotas est égale ou inférieure à celle des sondages aléatoires.
3. Les sondages par téléphone sont-ils fiables ?
Aujourd’hui, la majorité des sondages sont, en France, réalisés par téléphone. Cette technique s’est rapidement développée ces dernières années au détriment du ' face à face ', c’est-à-dire de l’interrogation des personnes à leur domicile. Les difficultés d’accès aux habitations (digicodes, problèmes de sécurité) ont pesé sur cette évolution.
Le taux d’équipement téléphonique des foyers français est désormais tel que la représentativité des échantillons peut être assurée dans de bonnes conditions. L’avantage du sondage téléphonique, par rapport au face à face, est d’abord d’être plus rapide. Il permet aussi d’assurer une plus grande dispersion géographique de l’échantillon. Il réduit enfin les risques de ' bidonnage ' des enquêteurs, le contrôle de leur travail pouvant être effectué plus facilement.
Le sondage téléphonique a cependant comme inconvénient de se prêter difficilement aux enquêtes les plus complexes. Le questionnaire soumis doit être plus simple dans la mesure où il est impossible de soumettre aux sondés, par écrit, une liste d’arguments.
4. Comment élabore-t-on un questionnaire d’enquête ?
L’élaboration du questionnaire est une phase très importante du sondage. La qualité du questionnaire conditionne largement la pertinence de l’enquête. Or l’art de poser de bonnes questions, dans des termes intelligibles au plus grand nombre, est difficile. Certains sondages pêchent par une formulation trop complexe qui égare les sondés. D’autres questionnaires peuvent être biaisés, c’est-à-dire que la manière de poser la question influencera plus ou moins fortement la réponse.
C’est dire que la rédaction d’un bon questionnaire doit être l’affaire de professionnels compétents. L’institut de sondages est intellectuellement responsable des questions posées. Mais il lui faut souvent résister à la pression de ses clients qui cherchent, consciemment ou inconsciemment, à lui faire poser des questions rédigées dans une forme favorable à leurs points de vue.
5. Quelle est la marge d’erreur d’un sondage ?
En théorie, on ne peut pas connaître scientifiquement la marge d’erreur d’un sondage réalisé par quotas (voir question 2). En pratique, on estime que cette marge est du même ordre que celle que la loi de Gauss permet de calculer dans le cas des sondages aléatoires.
La marge d’erreur d’une enquête dépend d’abord du nombre de personnes interrogées. Par exemple, elle est d’un maximum de plus ou moins 3,2% pour 1000 sondés. Concrètement, cela signifie que si 50% d’un échantillon de 1000 personnes a répondu A à une question, il y a 95% chances sur 100 pour que cette même réponse A soit effectivement donnée dans l’ensemble de la population par un pourcentage situé entre 46,8% et 53,2%. Le plus probable est cependant que la réponse se situe très près de 50%.
Attention : la marge d’erreur est la même quelle que soit la taille de la population dont on recherche à connaître l’opinion. Autrement dit, si l’on souhaite obtenir la même précision, il faut interroger autant de personnes pour connaître l’opinion des Français que celle des seuls Orléanais. La marge d’erreur ne décroît pas proportionnellement au nombre de personnes interrogée : elle est d’un maximum de plus ou moins 4,5% pour 500 enquêtés, 3,2% pour 1000, 2,2% pour 2000 mais encore 1,6% pour 4000.
La marge d’erreur varie aussi en fonction de la répartition des réponses. Ainsi, pour 1000 personnes interrogées, elle sera de plus ou moins 3,2% si la réponse obtenue est de 50% mais seulement de plus ou moins 2,5% si elle est de 20 ou 80% et même de plus ou moins 0,9% si elle est de 2 ou 98%.
6. Comment évite-t-on les enquêtes « bidonnées » ?
La qualité du ' terrain ' est, après celle du questionnaire, la deuxième condition d’une bonne enquête. On veut dire par là que le sondage doit être administré dans de bonnes conditions : les enquêteurs doivent respecter des règles précises et ne pas tricher en remplissant les questionnaires obtenus.
Comment éviter que des enquêteurs indélicats ne ' bidonnent ', c’est-à-dire ne remplissent les questionnaires eux-mêmes sur un coin de table de bistrot, ou attribuent aux personnes interrogées des caractéristiques fausses par commodité ? Les instituts répondent à cette préoccupation par des procédures de contrôle. Il est très fréquemment demandé à la personne interrogée d’indiquer son nom et son numéro de téléphone. L’institut peut alors, de temps à autre, vérifier que cette personne a effectivement été interrogée et que l’identité socio-démographique indiquée dans la questionnaire est exacte.
Ce contrôle est rendu plus aisé en cas de sondage par téléphone. Il suffit alors qu’un responsable procède à des écoutes tournantes des enquêteurs qui travaillent à partir d’un standard téléphonique.
7. Pourquoi les sondages préélectoraux sont-ils redressés ?
Si les instituts de sondage publiaient les résultats bruts de leurs enquêtes, en période préélectorale, ils se tromperaient lourdement. Les intentions de vote recueillies présentent en effet deux sortes de problèmes. Le premier vient de ce que tous les électeurs ne sont pas également accessibles. Certains d’entre eux refusent souvent de répondre aux enquêtes d’opinion, par crainte ou par hostilité à l’égard de l’univers politique - c’est aujourd’hui parfois le cas de l’électorat du Front national. D’autres électeurs ont, à l’inverse, tendance à répondre plus souvent que la moyenne aux sondages - par exemple, les personnes qui ont un niveau d’études élevé. Ces différences de comportements biaisent les résultats bruts de l’enquête : la gauche modérée est ainsi généralement sur-représentée dans l’échantillon, tandis que les extrêmes de l’échiquier politique sont sous-représentés.
Deuxième cause de « biais » : certains électeurs n’osent pas dire pour qui ils ont l’intention de voter. Naguère, une partie de l’électorat communiste indiquait faussement aux enquêteurs qu’elle allait voter socialiste. Aujourd’hui, certains électeurs du Front national prétendent qu’ils voteront UMP...
8. Comment réalise-t-on les opérations estimations le soir des élections ?
Dimanche soir, 20H. Les derniers électeurs viennent à peine de déposer leur bulletin de vote dans l’urne que les chaînes de télévision annoncent les résultats du scrutin sous la forme d’estimations particulièrement fiables. Soulignons qu’il ne s’agit pas ici de sondages : les estimations sont basées, non sur des intentions de vote, mais sur le décompte de bulletins effectivement dépouillés.
L’astuce consiste à poster des enquêteurs dans toute une série de bureaux de vote qui ferment dés 18H. Les résultats de ces bureaux sont communiqués au plus vite à l’institut de sondage. Celui-ci aura pris soin de sélectionner des bureaux suffisamment diversifiés (politiquement, géographiquement et sociologiquement) pour que leur résultat d’ensemble ait les meilleures chances d’être représentatif du résultat national.
9. Quel est le coût d’un sondage ?
Le coût d’une question fermée dans un sondage réalisé auprès d’un millier de personnes représentatives de la population française est d'environ 1000€ HT. Le coût d’une enquête d’opinion sera moins élevé si elle est réalisée en même temps que d’autres enquêtes. C’est ce que l’on appelle les enquêtes ' omnibus '. Les sondages réalisés pour la presse sont souvent vendus moins chers que ceux qui n’ont pas vocation à être publiés. Le prix des sondages pourra enfin être moins élevé si le client s’abonne à toute une série d’enquêtes.
10. Quel est l’intérêt des baromètres ?
Un baromètre est un sondage dont les questions sont répétées, dans les mêmes termes, à des intervalles de temps bien définis. Les baromètres politique sont souvent mensuels, tandis que les baromètres économiques peuvent être trimestriels. Le grand avantage des baromètres est de permettre d’analyser les évolutions de l’opinion.
11. Pourquoi publie-t-on autant de sondages en France ?
La France est sans doute le pays qui publie le plus de sondages au monde. On compte, en moyenne, près de 500 enquêtes publiées par an. Les sondages politiques sont particulièrement nombreux, même par rapport à ce qui se passe aux Etats-Unis, le berceau des sondages. Les médias français publient ainsi six baromètres mensuels de popularité de l’exécutif !
Cette abondance de sondages tient à plusieurs causes. La première est sans doute la personnalisation de la vie politique française, qui provient en grande partie de l’élection du président de la République au suffrage universel, et qui incite à surveiller de près les popularités des différents leaders. On peut encore évoquer la symbiose entre le monde de la science politique et celui des sondages. Ou encore l’appétit de la presse française pour les enquêtes d’opinion.
12. Les instituts réalisent-ils surtout des sondages politiques ?
Les sondages politiques ne sont que la partie émergée de l’iceberg des études d’opinion. Ce sont les plus visibles, mais la grande majorité des enquêtes réalisées par les instituts de sondage relèvent du marketing et des études de marché. Au final, les consommateurs sont beaucoup plus souvent sondés que les citoyens.
13. Y a-t-il beaucoup de sondages confidentiels ?
Tous les sondages politiques réalisés ne sont pas publiés. Un bon nombre d’entre eux sont commandés par des partis, des dirigeants ou des gouvernants qui gardent les résultats pour eux. Ces sondages confidentiels visent fréquemment à éclairer la stratégie des acteurs politiques. Ils peuvent avoir pour objet de tester les réactions de l’opinion à une mesure envisagée par le pouvoir pour lui permettre d’affiner son argumentaire. Les enquêtes confidentielles ne sont pas toutes quantitatives. Bien au contraire, le milieu politique est friand d’enquêtes ' qualitatives ' qui l’aident à mieux sentir les nuances de l’opinion.
14. Peut-on faire dire n’importe quoi aux sondages ?
Avec une parfaite mauvaise foi, il est toujours possible de faire dire n’importe quoi aux chiffres en général et aux sondages en particulier. Un sondages réalisé dans des conditions fantaisistes et basé sur un questionnaire biaisé a toutes les chances d’aboutir à des résultats peu significatifs.
Mais ceci ne signifie pas que les sondés répondent n’importe quoi. Au contraire, il est frappant de constater que les contradictions apparentes que l’on peut relever à la lecture d’une enquête correspondent la plupart du temps à de réelles ambivalences de l’opinion. Un sondage intellectuellement honnête ne craindra pas de faire apparaître ces différentes facettes d’une opinion publique qui pense souvent à la fois ceci et cela.
15. Les sondages influencent-ils les électeurs ?
Traditionnellement, les politologues répondent non à cette question. Ils expliquent doctement que l’influence des sondages sur le comportement électoral est indémontrable. Ils ajoutent que les effets possibles doivent logiquement se compenser : certains électeurs seraient tentés de voler au secours de la victoire, tandis que d’autres seraient incités à voter pour le camp donné perdant par les enquêtes d’opinion.
En réalité, et au fur et à mesure que les sondages rythment les campagnes électorales, cette influence est devenue difficile à nier. Les médias se font largement écho de cette information. Il est normal que l’électorat intègre cette dernière dans ses calculs. Ce faisant, les citoyens se déterminent en sachant, plus ou moins précisément, quels sont les rapports de forces du moment. Ce vote informé n’est nullement condamnable, à moins de plaider pour une conception quelque peu obscurantiste de la démocratie.
16. Quand les sondages ont-ils été créés ?
Les sondages sont apparus aux Etats-Unis pendant la période de l’entre -deux - guerre. C’est en 1935 que George Gallup a créé l’institut de sondage qui porte son nom. L’élection présidentielle américaine de 1936 apporta une démonstration éclatante de la validité des sondages préélectoraux. Le sociologue Jean Stoetzel, très impressionné par ces résultats, introduisit les sondages en France dés 1938 en fondant l’IFOP (Institut français de l’opinion publique). Le premier sondage politique publié en France porta sur les accords de Munich : 57% des personnes interrogées les approuvaient. Mais les parlementaires se montrèrent encore plus optimistes : 88% des parlementaires votèrent ces accords...

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